Mur d’enceinte de la ville d’Alep (n.d.)
Localisation : mur d’enceinte entourant la vieille ville.
Visite en : 2006, 2008, 2009.
Réf :
Eddé (1987), p.63-72
Eddé (1988), p.226-240
Gaube (1984), p.162-168, n°3, 252, 443, 444
Herzfeld (1955), p.13-76
Korn (2004), n°13, 32, 51, 83, 102, 123, 129
Meinecke (1992), 24B/4, 26A/21, 29/27, 33/35, 42/171, 43/2, 47/39, 47/59
Saba (1983), p.113-123
Sauvaget (1929), p.133-159
Berchem/Oppenheim (1913), n°54, 55, 56, 57
Herzfeld (1955), n°1, 7, 12, 14, 15, 25 A-B
RCEA 3664, 4751, 792008
Historique
Période antérieure
Les tremblements de terre de 552/1157 et du 12 shawwal 565/29.VI.1170
ont entrainés de sérieux dégâts et des effondrements de pans de mur de l’enceinte.
Le sultan Nûr al-Dîn (r.541/1146-569/1174) fait faire des réparations suite à
ces deux séismes et fait aussi creuser un fossé (fasîl)[1].
Période Ayyûbide
Le sultan al-Zâhir Ghazî (r.582/1186-613/1216), alors sultan d’Alep, commence l’expansion des fortifications de la ville et la construction (ou l’approfondissement) du fossé à partir de 592/1195. Entre Bâb al-Jinan et la «tour du serpent» (burj al-Ta’abîn) en direction de Bâb al-Yahûd, le mur est avancé vers l’ouest et le nord. Dans cette section, Bâb al-Faradis est déplacée, cette phase n’est achevée qu’à l’époque du sultan al-Nâsir Yusuf II (r.634/1237-658/1260). Al-Ghazî a personnellement supervisé les travaux de construction. Les travaux de construction des tours individuelles ont été répartis entre les émirs, dont chacuns des noms figuraient sur une inscription.
Une partie de l’enceinte de cette période a été retrouvée lors de fouilles ; un mur d’environ 3,5 m d’épaisseur fait saillie devant les tours rectangulaires du mur de Nûr al-Dîn ; une tour semi-circulaire, probablement identifiée avec burj al-Ta’abîn, a été intégrée dans la massive tour d’angle nord-ouest. Ces travaux s’achevent en 611/1214. Par crainte d’une menace d’affrontement avec le sultan al-‘Adîl, al-Zâhir Ghazî fait renforcer les fortifications de la ville. Il fait aussi agrandir l’ancien «khandaq al-Rûm» (fossé romain), dont l’origine historique n’est pas claire, pour former la ligne extérieure des fortifications de la ville. Depuis l’ancien quartier fortifié de Qal’at al-Sharîf vers Bâb Qinnasrîn au sud de la ville, la nouvelle fortification s’étend de Bâb al-Maqâm sur le côté sud jusqu’à Bâb al-Nairab à l’angle sud-est ; puis continuait vers le nord courant sur environ 200 m à l’est de la citadelle jusqu’à Bâb al-Qanâh/Bâb al-Hadîd à l’angle nord-est et de là bifurque vers l’ouest jusqu’à ce qu’elle rejoigne le mur de la ville existant à l’est du Bâb al-Nasr (ill.1). Trois nouvelles portes ont été percées, mais elles ne sont pas achevées sous le sultanat d’al-Ghazi.
L’atabeg Tughrîl fait construire une tour forte (burj ‘azîm) dans le mur nord entre le Bâb al-Nasr et le Burj al-Ta’abîn. Ce projet de construction peut être daté d’avant la majorité d’al-‘Azîz Muhammad (r.613/1216-634/1237) vers 628/1230. Plus tard, al-‘Azîz Muhammad fait ériger un mur en briques de terre crue (labîn) sur le mur construit par al-Zâhir Ghazî du côté est de la ville.
Face à l’avancée mongole, al-Nâsir Yusuf II fait agrandir les fortifications de la ville. Une bonne vingtaine de tours, sur un total de plus de 120, sont agrandies et pourvues d’un glacis à la base. On suppose que les assises carrées sous la maçonnerie mamluk des tours rectangulaires au nord et au sud de Bâb Antakîya sont attribuées à cette phase de travaux d’al-Nâsir Yusuf II. Puis dans la partie occidentale de l’enceinte, al-Nâsir Yusuf II a fait contruire une nouvelle porte, Bâb al-Sa’ada. Elle conduisait au terrain de polo et de parade du Maidan al-Hasa; son emplacement peut être supposé à l’extrémité ouest de l’allée qui s’étend d’est en ouest dans la partie sud de Jallûm. Le complexe ressemblerait à Bâb al-Arba’în avec deux tours, un corridor (dargâh) et deux portes.
Période Mamluk
Les invasions mongoles de 658/1260 font beaucoup de dégâts dans la ville et sur le mur d’enceinte. Suite au siège d’Alep qui débute le 2 safar 658/18.I.1260, les troupes mongoles réussissent une incursion, le 9 safar/25.I.1260, par le front sud du rempart vers Bâb Qinnasrîn : la ville est pillée jusqu’au 14 safar 658/30.I.1260.
La première restauration depuis cette invasion est l’œuvre du gouverneur Kumushbughâ al-Hamawî (en poste de 791/1389 à 800/1397)[2] en 792/1389-1390 seulement et à la demande des habitants d’Alep. On retrouve le nom de ce gouverneur sur une inscription de restauration à Bâb Antakîya et à la Mosquée al-Nûrî de Hama. Avec ces travaux, qui ne sont pas qu’une simple réparation de l’enceinte antérieure aux Mamluk, deux portes du front nord (Bâb al-‘Ibara et Bâb al-Faraj) sont ouvertes. Les travaux à Bâb Antakîya tardent jusqu’en ramadan 792/13.VIII-11.IX.1390.
Après la dévastation d’Alep pendant l’occupation de Timur en 802/1400, le mur d’enceinte et les portes sont provisoirement réparés par le gouverneur Duqmâq al-Muhammadî (en poste du 22 muharram 804/1.IX.1401 jusqu’en 806/1403)[3] à partir de rajab 804/4.II.1402 et jusqu’au 5 ramadan 804/8.IV.1402. Ce gouverneur a aussi fait restaurer Bâb Antakîya.
Lors d’une visite à Alep le 13 rajab 820/26.VIII.1417 le sultan al-Mu’ayyad Shaykh (r. 1 sha’ban 815/6.XI.1412 – 9 muharram 824/14.I.1421) a donné des instructions pour renouveler et renforcer le mur d’enceinte de la ville (ill.5, 15). Jusqu’à sa mort, le 9 muharram 824/14.I.1421, une grande partie du mur ouest et sud ainsi qu’une partie, aujourd’hui non conservée, du mur est de la citadelle ont été achevés sous la conduite de ‘Alam al-Dîn Sulaiman ibn al-Jâbî.
La partie du mur remise en état sous al-Mu’ayyad Shaykh est achevée pour le compte du sultan al-Ashraf Barsbay (r.8 rabi’II 825/1.IV.1422 – 13 dhu’l-hijja 841/7.VI.1438). Le cadi ‘Abd al-Basît ibn Khalîl se rend, dans ce but, à Alep le 19 rajab 830/16.V.1427 ; le sultan était déjà rentré au Caire quand il fait son compte rendu le 17 ramadan 830/12.VII.1427, la date de sha’ban 831/16.V-13.VI.1428, cité par ibn Shihna, comme date de début des travaux, doit être corrigée pour sha’ban 830/28.V-25.VI.1427. En raison d’un changement partiel de plan, les travaux mis en oeuvre, sous la conduite du gouverneur de la citadelle Bâk al-Ashrafî concernent le vieux mur est démoli et le mur d’enceinte est et sud qui sont agrandis.
Une partie du mur ouest est restaurée pour le compte du sultan al-Ashraf Qaitbay (r. 6 rajab 872/31.I.1468 – 27 dhu’l-qa’da 901/7.VIII.1496) de 893/1487-1488 à 894/1488-1489.
Puis une partie du mur est est restaurée en jumada II 903/25.I-22.II.1498 pendant le règne du sultan al-Nâsir Muhammad ibn al-Ashraf Qaitbay (r.26 dhu’l-qa’da 901/6.VIII.1496 – 15 rabi’I 904/31.X.1498), sous la conduite du gouverneur de la citadelle d’Alep Misrbay al-Ashrafî, information confirmée par l’inscription sur le mur de la mosquée d’Altinbughâ (ill.20).
La restauration de cette partie du mur est prouvée par deux blasons inscrits, non datés, mentionnant le sultan al-Ashraf Qânsûh al-Ghaurî et est probablement aussi en rapport avec le renouvellement des portes est Bâb al-Ahmar et Bâb al-Hadîd.
Des fouilles aux alentours du Sheraton Hotel à l’angle nord-ouest de l’enceinte ont permis d’exhumer une portion du mur avec ses installations. Ces vestiges sont conservés en contrebas de l’actuel hôtel (ill.23-31).
Epigraphie
n.d. Texte de construction (64x47) 2
lignes sur la tour du fossé nord[4].
« xxx le subjugueur des infidèles et des polythéistes, xxx, Abul-Fath Baibars al-Sâlih[î] »
820-823/1417-1420. Texte de construction sur le 2e saillant au sud de Bâb al-Jinân, bandeau sous les échauguettes (ill.5)[5].
« (A ordon)né de (remplir) ses (brêches)
et de renforcer ses angles, notre maître le sultan al-Malik al-Mu’ayyad
Abû’l-Nasr Shaykh »
821/1418. Texte de reconstruction
(250x53m) 1 ligne sur le 2e saillant du front sud, bandeau au-dessus
d’un machicoulis (ill.15)[6].
« A ordonné sa reconstruction notre
maître le sultan al-Malik al-Mu’ayyad Abû’l-Nasr Shaykh, au cours de l’année
821 (1418) »
894/1489. Texte de
restauration (310x60) du 1er saillant au sud de Bâb Antakîya, plaque
en 3 parties entre 2 cartouches[7].
« A ordonné de le restaurer notre maître
le sultan tout puissant, al-Malik al-Ashraf Abû’l-Nasr Qaitbay – que sa
victoire soir glorifiée ! – à l’époque de Sa haute Altesse Sayf al-Dîn
Kurtbay, lieutenant de la citadelle d’Alep la bien gardée, en l’année 894
(1489) »
n.d. Texte religieux
(600x50) sur le 1er saillant du front sud, 1 lignes, entre les consoles
et sur le linteau de la fenêtre (ill.10)[8].
« Coran XLI, 46 »
903/1491. Texte de
reconstruction à la mosquée Altinbugha (230x45) bandeau de 2 lignes avec
ansae à palmettes (ill.20)[9].
« Au nom d’Allâh …..
a ordonné de reconstruire cette muraille à l’époque de notre maître, le sultan
al-Malik al-Nâsir Abî’l-Sa’âdât Muhammad, fils d’al-Malik al-Ashraf Qaitbay –
que sa victoire soit glorifiée ! – Son Altesse gracieuse Jânbalât,
gouverneur d’Alep la bien gardée, avec l’administration de Sayf al-Dîn Misrbây,
lieutenant de la citadelle d’Alep, à la date du jumada II de l’année 903
(février 1491) »
n.d. Texte de construction (100x35) 3
lignes sur la 7e tour au sud de Bâb al-Faraj
(plus en place)[10].
« Coran VII, 87. Grâce à Allâh le maître des mondes, a construit ce khân béni
l’esclave avide d’Allâh l’Exalté, le shaykh Husain,
fils de Mustafa al-Bistamî – qu’Allâh
le bénisse ! – le hafîz, fils de hafîz, fils d’un hafîz ».
Biblio complémentaire :
Tabbaa (1997), p.15-22
Eddé (1999)
Asad (2000), p.188-194
Tabbaa (2006), p.176-184
Vigouroux (2019), p.301-322
Haddad (2020c)
Vigouroux (2021), p.303-325
|
|
|
|
|
1/ plan des phases de construction de l’enceinte |
2/ plan de la tour du front ouest au nord de Bâb
Antakîya |
3/ élévation de la tour au nord de Bâb Antakîya |
4/ vue de la tour au nord de Bâb Antakîya |
5/ l’inscription datée 820-823/1417-1420 de la tour |
|
|
|
|
|
6/ vue de la tour depuis le sud |
7/ vue du front sud-ouest avant le 1e
bastion sud |
8/ vue du front sud-ouest vers le 1e
bastion sud |
9/ vue du 1e bastion sud |
10/ l’inscription non datée sur le 1e
bastion sud |
|
|
|
|
|
11/ le bastion sud depuis l’est |
12/ vue du front sud entre les deux bastions sud |
13/ vue du front sud entre les deux bastions sud |
14/ vue du 2e bastion sud |
15/ l’inscription datée 821/1418 |
|
|
16/ vue du front sud depuis l’est |
17/ section de l’enceinte sud-est entre Bab Nayrab
et la mosquée Altinbugha |
|
|
|
|
|
18/ section de l’enceinte sud-est entre Bab Nayrab
et la mosquée Altinbugha |
19/ section de l’enceinte sud-est entre Bab Nayrab
et la mosquée Altinbugha |
20/ l’inscription datée 903/1491 sur le mur de la
mosquée Altinbugha |
21/ section de l’enceinte est au nord de la mosquée
Altinbugha |
22/ section de l’enceinte nord-est vers Bâb al-Hadîd |
|
|
|
|
|
23/ plan des fouilles de l’enceinte nord-ouest
(actuellement la cour du Sheraton) |
24/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
l’est |
25/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
l’est |
26/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
l’est |
27/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
le sud |
|
|
|
|
28/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
le sud |
29/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
le sud |
30/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
l’ouest |
31/ vue des vestiges de l’enceinte nord-ouest depuis
l’ouest |
Documents anciens
[1] Sur l’historique de l’enceinte antérieur aux Ayyûbides, cf. Herzfeld (1955), p.13-76 ; Sauvaget (1929), p.133-159 ; Eddé (1987), p.63-72 ; Eddé (1999).
[2] Sur Kumushbugha, cf. Mayer (1933), p.146-147.
[3] Sur Duqmâq, cf. Mayer (1933), p.115-116.
[4] Texte d’après RCEA 4751.
[5] Texte d’après Herzfeld (1955), n°7.
[6] Texte d’après Herzfeld (1955), n°15.
[7] Texte d’après Herzfeld (1955), n°12.
[8] Texte d’après Herzfeld (1955), n°14.
[9] Texte d’après Herzfeld (1955), n°25a.
[10] Texte d’après Herzfeld (1955), n°4.