Qal’at Shawbak/Montreal
Localisation : à 75km au sud de Kerak, soit trois étapes et 30km au nord de Petra, par la route 35.
Réf :
Brown (1988), p.225-245
Brunnow/Domaszewski (1904), p.113-119
Burckhardt (1822), p.416-417
Korn (2004), p.92
Luynes (1874), II, p.82-177
Mauss/Sauvaire (1867), p.449-523
Mauss/Sauvaire (1874), in Luynes (1874),
II, p.145-153
Meinecke (1992), 4/31
Brunnow/Domaszewski (1904), p.118-119
Luynes (1874), II, p.209-213, pl.17-18
Omoush/Jbour (2015), p.24-52
RCEA 4735, 5048-5051
Historique
La région a une position stratégique entre Mer Rouge et Mer Morte et sur la route le Caire-Damas. Cette région de l’Idumée/Edom est célèbre pour sa culture irriguée dont celle de la canne à sucre. La forteresse est perchée sur un cône rocheux encerclé de profonds ravins qui semblent déjà occupés sous les Byzantins comme en témoignent les villages à l’est.[1] Le site est approvisionné en eau par deux sources passant aux pieds de la forteresse, et reliées au château par une galerie souterraine.[2]
C’est le roi Baudoin qui commence la construction d’une forteresse en 1115, probablement sur les ruines d’un fort byzantin.
La construction de la forteresse répond à deux objectifs principaux : le contrôle de la route du désert et garantir avec Kerak la sécurité des terres d’Oultre Jourdain.
En 1120 la région de Shawbak/Montreal est érigée en fief par Romain du Puy, puis en 1133 par Payen le Bouteiller qui fortifie le site en 1142. En 1152 une charte mentionne le don d’une tour de l’enceinte aux Hospitaliers (certifiant ainsi l’existence d’une barbacane peut être la tour T10 avec l’église). Cette donation sera confirmée en 1177 par Renaud de Châtillon.
La forteresse présente deux enceintes circulaires parallèles entre elles. Plusieurs ruelles desservent trois principaux quartiers : le palais au nord, l’Eglise à l’est et les habitations et magasins au sud-ouest. Une rampe d’accès en provenance du fond de la vallée au sud, remonte par le nord et débouche à l’est par la barbacane (P3, l’actuel accès) et à l’intérieur au corridor via P1 et P2.
L’enceinte intérieure présente des tours quadrangulaires peu saillantes (en chiffre romain sur plan, ill.1) et une église (ill.79-82). Cette phase correspond aux travaux des Francs.
Période Ayyûbide
En 1171 Saladin assiège la forteresse une première fois sans succès, deuxième tentative en 1172-1173 et finalement en 1175 il saccage l’arrière pays. La forteresse n’est pas prise suite à la bataille de Hattîn en 583/1187 mais capitule en Mai 585/1189 et passe sous contrôle des Ayyûbides. A la mort de Saladin en 589/1193, elle est récupérée par le sultan al-‘Adîl (r. 592/1196 – 615/1218) et en 1208 par al-Mu’azzam ‘Isa alors sous tutelle (r. 615/1218 – 624/1227). La forteresse est durement touchée par le séisme de 610/1212.[3]
Au nord de la forteresse on trouve un palais construit pendant l’occupation Ayyûbide, peut-être daté du règne d’al-‘Adîl (r.592/1196-615/1218) ou d’al-Mu’azzam ‘Isa (r.615/1218-624/1227).[4] Ce palais présente un schéma similaire à celui de la forteresse de Kerak (ill.62-67). A cette même période, le site du Khirbat al-Dusâq à 6km à l’est, est construit. Ce site de villégiature avec ses caractéristiques militaires semble lié à la forteresse.
Période Mamluk
La forteresse reste possession Ayyûbide jusqu’au 3/III/1261 date de l’assaut de l’émir Bilik pour le compte du sultan Baybars (r.17 dhu’l-qa’da 658/24.X.1260 – 27 muharram 676/30.VI.1277), puis pour le sultan al-Mansûr Qala’ûn (r.27 rajab 678/3.XII.1279 – 6 dhu’l-qa’da 689/10.XI.1290) en 679/1280. En 692/1293 le sultan al-Ashraf Khalîl (r.7 dhu’l-qa’da 689/11.XI.1290 – 12 muharram 693/13.XII.1293) ordonne le démantèlement de la forteresse mais elle est rapidement restaurée par le sultan al-Lajîn (r.27 muharram 696/25.XI.1296 – 10 rabi’ II 698/15.I.1299) à partir de 698/1297-1298 comme en témoignent plusieurs inscriptions.
Le sultan Baybars entreprend des restaurations probablement après la conquête du 26 dhu’l-hijja 659/21.XI.1261, puis une vaste restauration documentée par les inscriptions est entreprise avec le sultan al-Lajîn. Ces travaux concernent les tours T05 (ill.11-12, 51), T06 (ill.14-16, 53-59), T09 (ill.21-29, 69-72), T10 qui ensèrent les constructions franques, les tours T01 et T03 sont restaurées et les tours T07 et T08 reçoivent un dédoublement de leur façade avec des pierres à bossage.
Début 2002 des fouilles aux pieds de la tour T01 ont permit de dégager un ensemble d’édifices à vocation économique. Ces fouilles italiennes exhument de nouvelles structures avec des fours au sud de la barbacane du 12e siècle et la troisième enceinte, vers la tour T01. Ces structures correspondent à une installation Ayyûbide, pas très bien identifiée, construite sur des vestiges Croisés (une église et la chapelle reliée par une salle) qui sera restaurée et agrandie par les Mamluk, cette zone semble avoir accueillie le quartier des Hospitaliers. Ces installations artisanales comprennent : un site avec douze bassins rectangulaires et un réservoir dans la narthex de l’église, et un grand édifice contenant un four surmonté d’une cuve cylindrique. Au premier abord il pourrait s’agir d’une teinturerie pour les tapis fabriqués à Shawbak[5], ce site étant renommé pour cela à la fin du 14e siècle. Toutefois une étude ultérieure identifie le site comme une fabrique de savon[6], ces deux types d’installations étant assez similaires dans leur équipement. Ces installations peuvent être datées des restaurations du sultan al-Lajîn (ill.31-33, 27-39).
La forteresse présente aussi une double enceinte parallèle qui semble indissociable l’une de l’autre et la seule liaison entre ces deux enceintes se fait au niveau de la partie soutenant l’église. On note aussi qu’à chaque saillants francs correspond un éléments Mamluk (par ex. tour T05 et III).
Il y a peu de sources sur le site aux 13e et 14e siècles. En 1520 les Ottomans placent la forteresse sous la juridiction du liwan de ‘Ajlûn. En 1840 elle est dynamitée par les troupes de Ibrahim Pacha, et joue un rôle dans la révolte Arabe en 1917.
Le site est exploré en 1866 par Mauss et Sauvaire[7], en 1897 par Brünow et Domaszewski[8], en 1935 par Glüeck qui s’occupe des environs.
En 1960 le village bédouin qui occupait la forteresse est déblayé, en 1962 la chapelle et la cathédrale sont étudiées et en 1986 le palais Ayyûbide est fouillé.[9] En 1999 une campagne italienne analyse la maçonnerie[10] et une nouvelle étude photogrammétrique sur le bâti est publiée.[11]
Les réserves du château du bâtiment VIII conservent un grand nombre de textes épigraphiques découverts lors de fouilles (ill.83-90), ils sont en partie publiés[12], on trouve aussi d’autres inscriptions déposées vers l’entrée du château (ill.29, 73, 74).
Epigraphie
651/1254. Fragments.[13]
« By the name of Allâh,
the most gracious, the most merciful, the place al-Mubarak has been established
in the days of our lord, the sultan, the king ibn Ahmad – May God immortal his
kingship - … done his orders on … Jamâl al-Dîn Qutuz in the month of the year
651 (1254) ».
n.d. Texte de construction 3 fragments A sur une tour semi-circulaire, B sur une tour carrée, C au-dessus d’une porte de maison.[14]
« xxxx, le champion de la foi, le
victorieux, Rukn al-dunya wal-dîn Baybars, fils de ‘Abd-Allâh, xxxx [l’associé
de l’ém]ir des croyants, que Dieu éternise sa royauté et xxx ! ».
697/1298. Texte de construction 3 lignes dans un cadre (inscription n°4, ill.51).[15]
« xxxx la fondation et la réfection de
cette citadelle ont été ordonnées par notre maître le sultan al-Malik al-Mansûr
Husâm al-dunya wal-dîn Lâjîn. Cela a eu lieu sous la haute direction du grand
émir ‘Ala al-Dîn Kubrus, serviteur d’(al-Malik) al-Mansûr, en l’année 697
(1298) ».
697/1298. Texte de construction 1 ligne sur la tour T06 (inscription, n°2, ill.15, 56).[16]
« Basmallâh. La
fondation et la réfection de cette citadelle ont été ordonnées par notre maître
le sultan al-Malik al-Mansûr, le savant, le juste, le champion de la foi,
l’assisté de Dieu, le vainqueur, Husâm al-dunya wal-dîn Lajîn. Cela (a été achevé)
en l’année 697 (1298) ».
697/1298. Texte de construction et signature 1 ligne en 5 parties sur la façade de la tour T09 et sur la façade gauche (inscription n°3, ill.22-27).[17]
« Basmallâh. La
fondation et la réfection de cette citadelle ont été ordonnées par notre maître
le sultan al-Malik al-Mansûr, le savant, le juste, le champion de la foi,
l’assisté de Dieu, le victorieux, Husâm al-dunya wal-dîn, le vainqueur, Abul-Fath
Lajîn, que Dieu éternise sa royauté et fasse durer ses jours ! cela (a été
achevé) en l’année 697 (1298), sous la haute direction de ‘Ala al-Dîn Kubrus
al-Mansûrî, que Dieu ait pitié de lui ! xxx Muhammad, fils de ‘Abd
al-Hamîd, l’ingénieur ».
n.d. texte de construction sur la façade d’un saillant rectangle (inscription n°1, ill.12).[18]
« xxxx la fondation et
la réfection de cette citadelle ont été ordonnées par le sultan al-Malik
al-Mansûr xxx ».
740/1340. Texte de construction.[19]
« al-Sultanî, al-Malikî,
al-Salihî, al-Najmî, the mister king al-Kamîl Muhammad ibn Bakr ibn ayyûb – may
God immortal his kingship – blessed ages … when he built wall and conquers
towers during two days … mastership’s of al-Shamî council the great glorious
‘Izz al-Dîn ibn Abdullâh, know by Alexandrian al-Malakî, al-Salihî, al-Bahrî …
in the month of the year 740 (1340) ».
n.d. Fragments.[20]
« We may extend that at
our will, supported by Muhammad the last messager ».
n.d. Fragments.[21]
« The right is
faithfulness ».
n.d. Fragments.[22]
« Baybars ibn Abed’l
Allâh ».
n.d. Fragments.[23]
« His hapiness and
advocate his victory.
n.d. Fragments.[24]
« The struggle for the
sake of Allâh ».
n.d. Fragments.[25]
« Allâh has
humiliated ».
n.d. Fragments.[26]
« al-Sultan, al-Malikî,
al-Kamîl … al-‘Adîl … may God immortal his kingship … al-Muaid al-A … ».
n.d. Fragments.[27]
« The most merciful …
order of our lord al … May God immortal his kingship … al-Muaid al-A… ».
n.d. Fragments (ill.89).[28]
« In the name of Allâh,
the most gracious, the most merciful, every soul is going to die, this tomb is
… to Allâh’s mercy … by Allâh’s power seven … Allâh forgive ».
Biblio complémentaire
Pringle (1997), p.75-76
Abeileh (1998)
Faucherre (2004), p.43-67
Dotti (2005)
Drap/Seinturier (2005), p.771-776
Seinturier/Drap (2005), p.538-543
Vannini/Nucciotti (2005)
Drap/Seinturier (2006), p.67-74
Drap/Seinturier (2006a), p.169-179
Dotti (2007), n°2
Vannini/Nucciotti (2007)
Burri (2009), p.61-67
Drap/Seinturier (2009)
Vannini/Nucciotti (2009)
Walker (2009b), p.126-131
Dotti (2010), p.23-37
Vannini/Marcotulli (2010), p.359-381
Abdel-Hadi (2012), p.1-6
Drap/Vaninni (2013),
p.329-340
Vannini/Marcotulli (2013), p.359-380
Blau (2015)
Omoush/Jbour (2015), p.39-41
Brown (2016), p.543-560
Nucciotti/Pruno (2016), p.309-321
Courbon (2018)
Marcotulli/Pruno (2015), p.187-202
Nucciotti/Fragai (2019), p.489-501
Vanni-Desideri (2019), p.23-48
IHSJ (2020), n°350
Pruno/Ranieri/Marcotulli (2020), p.401-423
Schick (2020), n°110
Vaninni (2020), p.83-108
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1/ plan général avec nomenclature |
2/ plan avec localisation des inscriptions |
3/ vue du site depuis l’est |
4/ vue du site depuis le sud-est |
5/ vue du site depuis le sud |
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6/ vue du site depuis le nord-ouest |
7/ vue du site depuis le Visitors Center à l’ouest |
8/ vue de la tour T12 depuis l’ouest |
9/ vue de la tour T05 depuis l’ouest avec l’actuelle
rampe d’accès |
10/ tours T05 et T06 |
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11/ façade de la tour T05 |
12/ bandeau inscrit non daté sur la tour T05 |
13/ vue de la courtine entre T05 et T06 |
14/ tour T06 depuis l’ouest |
15/ partie supérieure de la tour T06 avec le bandeau
inscrit daté 697/1298 |
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16/ tour T06 |
17/ front nord-est avec la tour T07 |
18/ tour T07 |
19/ front nord-est avec T08 et T09 |
20/ tour T08 |
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21/ tour T09 depuis l’actuelle rampe d’accès |
22/ façade de la tour T09 avec le bandeau inscrit
daté 697/1298 |
23/ tour T09 |
24/ partie supérieure de la tour T09 avec le bandeau
inscrit |
25/ l’inscription sur la face sud de la tour T09 |
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26/ façade sud de la tour T09 avec le bandeau
inscrit |
27/ détail du bandeau sur la façade sud de la tour
T09 |
28/ la tour T10 et l’actuel accès au château |
29/ fragments d’inscriptions déposés à l’entrée du
château |
30/ l’accès au château P3 depuis le sud, au-dessus
la chapelle |
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31/ plan du secteur industriel fouillé après 2002 |
32/ vue du secteur vers l’est avec l’accès P1 |
33/ vue du secteur vers l’est |
34/ l’accès P1 |
35/ le corridor après P1 en direction du nord |
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36/ bâtiment à droite de l’accès P1 |
37/ vue du secteur industriel depuis le corridor |
38/ vue de la tour T12 vers l’est |
39/ vue du secteur industriel |
40/ l’accès au souterrain entre les 2 enceintes |
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41/ l’allée vers le nord et T05 |
42/ l’allée vers le sud et T12 |
43/ bâtiments à droite de l’allée vers le nord |
44/ salles voûtées à droite de l’allée entre T03 et
T04 |
45/ tour T05 et bâtiment III depuis l’allée |
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46/ le corridor vers T05 et le bâtiment III |
47/ le corridor vers le nord et les accès à la salle
nord de T05 |
48/ le corridor vers le sud |
49/ le bâtiment III depuis le sud-est |
50/ le bâtiment III depuis l’est |
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51/ plaque inscrite datée 697/1298 au revers de T05 |
52/ la tour T06 depuis le corridor |
53/ vue intérieure de la tour T06 |
54/ archères de T06 |
55/ archères de T06 |
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56/ tour T06 depuis l’est |
57/ partie supérieure de T06 depuis l’est avec le
bandeau inscrit daté 697/1298 |
58/ détail du bandeau inscrit |
59/ vue de la plate forme sommitale de la tour T06 |
60/ vue de l’allée vers le sud, à droite le palais
Ayyûbide, au fond T09 |
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61/ tour T09 depuis le nord |
62/ plan du palais Ayyûbide |
63/ vue du palais vers le nord |
64/ la salle de réception du palais |
65/ le corridor menant à la salle de réception |
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66/ la salle de réception du palais |
67/ vue des salles annexes du palais |
68/ vue du bâtiment VII depuis l’ouest |
69/ partie supérieure de la tour T09 |
70/ façade de la tour T09 sur l’allée |
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71/ la tour T09 depuis l’allée |
72/ détail du bandeau inscrit sur la face sud de la
tour T09 |
73/ fragment d’inscription déposé vers la tour T09 |
74/ détail du fragment d’inscription |
75/ vue de la partie centrale du château depuis la
tour T09 |
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76/ le bâtiment VIII et la chapelle depuis T09 |
77/ la chapelle de puis le nord-ouest |
78/ la chapelle depuis le nord |
79/ salle voûtée du bâtiment VIII |
80/ la chapelle vers l’est |
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81/ l’annexe de la
chapelle vers l’est |
82/ la chapelle vers le nord |
83/ salle du bâtiment VIII |
84/ salle du bâtiment VIII servant de dépôt pour les
objets trouvés aux alentours |
85/ fragments d’inscriptions |
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86/ salle du bâtiment VIII servant de dépôt pour les
objets trouvés aux alentours |
87/ inscription 7 lignes conservée dans le bâtiment
VIII |
88/ inscription 7 lignes conservée dans le bâtiment
VIII |
89/ inscription 3 lignes conservée dans le bâtiment
VIII |
90/ inscription 5 lignes conservée dans le bâtiment
VIII |
Documents anciens
Burckhardt (1822), p.416-417. Visite le 19 août 1812.
August 19th. In the morning I went to the castle of Shobak, where I wished to purchase some provisions. It was distant one hour and a quarter from the encampment, in a S. E. direction. Shobak, also called Kerek el Shobak
( الشوق كر) perhaps the ancient Carcaria, is the principal place in Djebel Shera ; it is situated about one hour to the south of the Ghoeyr, upon the top of a hill in the midst of low mountains, which bears some resemblance to Kerek, but is better adapted for a fortress, as it is not commanded by any higher mountains. At the foot of the hill are two springs, surrounded by gardens and olive plantations. The castle is of Saracen construction, and is one of the largest to the south of Damascus ; but it is not so solidly built as the castle of Kerek. The greater part of the wall and several of the bastions and towers are still entire. The ruins of a well built vaulted church are now transformed into a public inn or Medhafe. Upon the architraves of several gates I saw mystical symbols, belonging to the ecclesiastical architecture of the lower empire. In several Arabic inscriptions I distinguished the name of Melek el Dhaher. Where the hill does not consist of precipitous rock, the surface of the slope is covered with a pavement. Within the area of the castle a party of about one hundred families of the Arabs Mellahein (ملاحين ) have built their houses or pitched their tents. They cultivate the neighbouring grounds, under the protection of the Howeytat, to whom they pay tribute. The horsemen of the latter who happen to encamp near the castle, call regularly every morning at one of the Medhafes of Shobak, in order to have their mares fed ; if the barley is refused, they next day kill one of the sheep belonging to the town.
Mauss/Sauvaire (1874), in Luynes (1874), II, p.145-153. Visite le 5 mai 1866.
[…] Sauvaire profite de ce retard pour prendre une épreuve de la face sud-ouest des murs de la ville. De mon côté je prends à la boussole une série de directions qui me permettront de rattacher au lieu de notre campement toute
la face qui se déroule devant nous.
En examinant à la lunette les murailles de la ville, nous apercevons de grandes inscriptions arabes éparses sur la surface d'une tour demi-circulaire et d'un grand redan. A cette distance, ces inscriptions paraissent être de la même
époque que celles de Karak : mais nous devrons attendre à ce soir pour nous en assurer. Des portions notables des murs anciens ont été détruites et remplacées par une maçonnerie grossière. Tous les couronnements des tours ont
été démantelés, et comme nous demandions à quelle époque la ville avait subi cette dévastation, nous apprîmes qu'Ibrahim Pacha, lors de la conquête de la Syrie, avait confié à un scheikh nommé Saïd Abou-Deis le soin de démanteler la place. Cette forteresse, beaucoup plus petite que Karak, a, comme cette dernière ville, une assiette très-forte, sur un rocher isolé, entouré de tous côtés par des wadys profonds. C'est un véritable nid de vautours.
Caché au milieu des collines qui l'environnent, et n'ayant qu'un accès fort difficile à découvrir pour des ennemis qui ne connaissaient pas le pays, le rocher de Chaubak était parfaitement choisi pour y asseoir une forteresse puissante, d'où le seigneur pouvait impunément faire jusqu'au chemin de la Mecque les incursions rapides et productives mentionnées dans l'histoire des croisades. Il était là parfaitement à l'abri, et nous savons que cette forteresse fut plusieurs fois assiégée. Elle resta même aux mains des croisés plus longtemps que Karak et ne tomba au pouvoir de Salah-Eddin qu'après un siège fort long.
Après notre déjeuner, nous pûmes nous préparer à monter à la ville, sous la conduite du vieux Abou-Dahyeh, des autres scheikhs de Chaubak et des étrangers qui nous avaient accompagnés ; à leur suite et autour de nous se pressent les indigènes, tous armés jusqu'aux dents. Nous gravissons lentement le sentier qui conduit, en contournant la colline, jusqu'à la mauvaise porte qui donne accès dans la forteresse. Chemin faisant, nous examinons attentivement les murailles, et Sauvaire, qui découvre les inscriptions que nous avons déjà aperçues de notre camp, veut déjà les copier ; mais je lui fais observer qu'il vaut mieux d'abord faire une visite générale pour nous rendre compte du travail à faire, et nous continuons notre ascension, toujours suivis par une foule considérable. Une fois dans l'intérieur des murs, nous reconnaissons, à notre grand désappointement, que cette forteresse qu'on nous avait décrite comme étant plus importante et mieux conservée que Karak, ne renferme plus, à l'intérieur, que quelques restes épars d'une antiquité très-peu reculée et dont le style semble rappeler quelques édifices élevés à Jérusalem au XIVe siècle.
La foule qui nous entoure est tellement gênante, qu'il nous serait impossible en ce moment de prendre le moindre croquis ou d'utiliser notre appareil de photographie. Encore moins pourrais-je commencer à lever un plan général, et je me vois avec peine forcé de remettre au lendemain un travail qu'il sera plus facile d'exécuter quand la curiosité des habitants sera un peu apaisée. Néanmoins Sauvaire, qui découvre plusieurs inscriptions arabes, trouve moyen de les transcrire, et la facilité avec laquelle il en fait la lecture étonne beaucoup notre entourage, car pas un seul de nos hôtes n'est capable d'en déchiffrer un mot.
Quelques portions des fortifications intérieures sont assez bien conservées, mais plusieurs courtines, entièrement démantelées, ont été remplacées par des murs de blocage grossier. Les inscriptions que nous avions cru appartenir,
comme celles de Karak, au règne de Daher Bibars, appartiennent à une autre époque. On remarque aussi dans certaines parties des murailles et éparpillées à différentes hauteurs, des pierres portant des fragments d'inscriptions. Cette particularité indique évidemment que les murailles, détruites une première fois, ont été refaites avec peu de soin à une époque que l'histoire seule pourra nous permettre de déterminer.
J'ai pu, pendant cette inspection générale, me faire une idée assez complète de la position de Chaubak, et j'ai pris une série de notes qui m'aideront à tracer assez exactement un plan topographique de ce rocher. A l'entrée de la ville subsiste encore une des arcades qu'Irby et Mangles avaient signalées pendant le voyage qu'ils firent dans ces contrées au commencement de ce siècle : c'était sans doute une espèce de porte triomphale qui donnait accès dans
la ville ; on y arrive par un escalier aujourd'hui fort grossier, taillé dans le roc. Le style des détails de cette porte rappelle ceux des édifices arabes du XIVe siècle. Mon hypothèse se trouve justifiée par une grande inscription sculptée au sommet d'une tour demi-circulaire et où Sauvaire découvre le nom d'un de mes confrères arabes du XIVe siècle. Il s'appelait Mohammed Abd-el-Hamid el Moendès. Chaubak, 672 de l'hégire.
Cette dernière inscription une fois copiée, nous redescendons à notre campement, et, traversant le ravin profond qui sépare le rocher de Chaubak du plateau sur lequel nous sommes installés, nous reconnaissons que parallèlement
à la face ouest du burdj carré que nous voyons du camp, régnent des portions notables d'un grand mur de soutènement adossé au revers opposé du ravin et s'étendant sur une longueur d'environ 120 à 130 mètres. J'avais d'abord pris ce mur pour celui d'une ancienne piscine; mais nous apprîmes bientôt que la tradition du pays fait de cet endroit l'emplacement d'un ancien bazar. Cela me paraît difficile à expliquer, car ce bazar aurait ainsi été tout a fait en dehors de la ville et situé au pied même du rocher de Chaubak […]
Nous reprenons notre travail à l'endroit où nous l'avions laissé, et nous parvenons enfin, sans faire de mauvaise rencontre, jusqu'à un point des fortifications d'où je puis commencer le relevé général du contour de la ville. C'est tout ce que je me bornerai à faire, car, dans l'état d'esprit où se trouvent les habitants, mes guides me laissent assez voir qu'il ne serait pas prudent de vouloir pénétrer dans les habitations. Je me mets donc immédiatement en besogne, et, comme la ville est très-petite, le contour général est bientôt relevé. Les fortifications sont, d'ailleurs, dans un état fort triste, et il est évident que certaines portions ont été rebâties à des époques différentes. On peut admettre que cette forteresse a été relevée sur le même plan que celui qu'avaient adopté les croisés. Mais les fragments d'inscriptions arabes que j'ai mentionnés plus haut et qu'on retrouve à toutes les hauteurs sembleraient prouver une deuxième reconstruction ; car il n'est pas probable que les croisés aient couvert leurs ouvrages d'inscriptions arabes. Une fois mon polygone fermé, et après avoir pris une série de directions qui me permettront de rattacher Chaubak aux environs, nous redescendons vers notre campement […]
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Plan de la forteresse de Shawbak d’après Ch. Mauss Source : Luynes (1874), atlas |
Vue de la forteresse de Shawbak depuis l’ouest
cliché de H. Sauvaire en 1866 Source : Luynes (1874), atlas |
[1] Cf. Shqairat (2018), p.1-14.
[2] Cf. Buri (2009), p.61-67, et Courbon (2018).
[3] Sur les séismes cf, Sbeinati (2005), p.389-391.
[4] Cf. Brown (1988), p.225-245 ; (2016), p.541-560.
[5] Cf. Vannini/Marcotulli (2013), p.359-380.
[6] Cf. Marcotulli/Pruno (2015), p.187-202.
[7] Cf. Mauss/Sauvaire (1867), p.449-523 et Mauss/Sauvaire (1874), in Luynes (1874), II, p.145-153.
[8] Cf. Brünnow/Domaszewski (1904), p.113-119.
[9] Voir les travaux de Brown à Shawbak et Kerak, in Brown (1988), p.225-245 ; Brown (1989), p.287-304.
[10] Dans le cadre du programme et de l’exposition Petra Medievale. Voir Vannini et Nucciotti, plusieurs articles.
[11] Dans le cadre d’une étude de cas sur l’utilisation de la photogrammétrie du bâti. Voir les résultats in Drap/Seinturier, plusieurs articles.
[12] Cf. Omoush/Jbour (2015), p.24-52.
[13] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.41, n°26.
[14] Texte d’après RCEA 4735, rassemblant les inscriptions de Luynes (1874), n°27, 28.
[15] Texte d’après RCEA 5048.
[16] Texte d’après RCEA 5049.
[17] Texte d’après RCEA 5050.
[18] Texte d’après RCEA 5051.
[19] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.41, n°23.
[20] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°14.
[21] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°15.
[22] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°16.
[23] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°18.
[24] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°19.
[25] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.40, n°20.
[26] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.41, n°24.
[27] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.41, n°25.
[28] Texte d’après Omoush/Jbour (2015), p.41, n°29.